Un bon employé fera-t-il un bon leader?

Oui, non, peut-être. En fait, il est difficile de prédire précisément quel genre de leader un bon employé pourra devenir.

Malheureusement, ce que je rencontre régulièrement en entreprise ce sont des cas de bons employés à qui l’on a confié un rôle d’encadrement, en tenant pour acquis qu’ils continueraient à faire du bon boulot. Mais voilà, insatisfaction, conflits, maladie, roulement de personnel, et j’en passe, se mettent de la partie. Ce type de promotion est souvent perçu comme un moyen de récompenser le travail d’un employé performant. Cependant, est-ce vraiment une récompense? Ou s’agit-il plutôt d’un cadeau empoisonné pour l’employé en question, son équipe et l’entreprise? Il existe pourtant d’autres moyens de récompenser un rendement exceptionnel (valorisation de la tâche, prime, bonification, etc.)

Des compétences distinctes

Il faut se rappeler que le bon employé et le bon leader utilisent des compétences qui sont généralement très différentes. Ce qui ne rend toutefois pas impossible la transition. Cependant, on doit prendre le temps d’évaluer le poste à doter : les compétences requises, les exigences, les attentes de l’organisation, etc. Par la suite, il est essentiel, même à l’interne, de faire un processus de sélection sérieux. Est-ce que l’employé ciblé pour le poste a les connaissances, les aptitudes et les attitudes nécessaires pour jouer ce rôle? J’insiste sur les attitudes. Puisque, je le répète, on recrute les gens pour leurs aptitudes et on les renvoie à cause de leurs attitudes.

Il existe pourtant des façons simples et très efficaces d’évaluer le potentiel de réussite d’une personne dans un poste donné. Le test AFC Compétences Génériques et le test Insights que j’utilise en sont de très bons exemples. Le petit investissement requis pour ce genre de test est généralement largement compensé par une sélection mieux ciblée et moins dommageable à moyen et à long terme.

Un choix non éclairé et de mauvais motifs

Évidemment, il est facile de blâmer l’employeur, mais qu’en est-il de l’employé qui accepte la promotion? Il n’est pas rare que la personne à qui l’on offre le poste l’accepte sans même en connaître les réelles implications, et ce, simplement pour améliorer son lustre (titre, pouvoir, etc.) et son sort (salaire, conditions, fonds de pension, etc.).

Un jour, dans le cadre du cours Gérer du personnel au quotidien, alors que nous faisions la rétroaction d’un entretien de coaching, une participante s’est mise à pleurer. Elle venait de réaliser qu’elle détestait rencontrer des employés pour des problématiques et c’est pour cela qu’elle évitait de la faire ou repoussait l’occasion le plus loin possible. Ce qui créait évidemment plus de tensions, de conflits et de départs sur son équipe.

Après discussion, elle réalisait qu’elle avait accepté ce poste pour le salaire et l’horaire. Dans les faits, ce qu’elle préférait par-dessus tout, c’était de gérer des systèmes et des processus et non des personnes. J’ai su quelque temps après la formation que la dame en question travaillait toujours pour le même employeur, mais était affectée à des tâches qui correspondaient mieux à son profil de compétences et à ses intérêts. C’est une fin heureuse, mais à quel prix? Quel a été, pour cette entreprise, le coût réel de cette mésaventure? Sans compter le prix payé par les membres de son équipe et elle-même (stress, maladie, perte d’emploi, etc.). Aurait-on pu éviter tous ces maux?

Une intégration réussie

Vous êtes certainement familier avec l’expression « apprendre sur le tas ». Or, c’est souvent le sort que l’on réserve à ces supers employés. De mon point de vue, en plus d’être risqué, c’est irresponsable de la part d’une entreprise de larguer un employé nouvellement promu  sans d’abord s’assurer qu’il comprend bien son rôle et les attentes. Mais surtout, sans l’accompagner (coaching, mentorat ou formation) et sans faire de suivi durant son intégration dans sa nouvelle fonction.

D’une part, un suivi adéquat permet au nouveau leader :

  • de sentir un soutien réel de la part de la direction;
  • d’éviter d’être rapidement isolé et submergé par la tâche;
  • de recadrer immédiatement, avant que les choses ne s’enveniment;
  • de se servir de ses erreurs comme levier de développement;
  • d’accepter le coaching et la critique constructive;
  • de recevoir du renforcement positif tout au long de son intégration;
  • en bref, de vivre lui-même ce qu’il devra faire vivre à ses collaborateurs.

Enfin, il ne faut pas oublier l’impact positif que peut avoir une intégration réussie sur l’ensemble des membres de l’équipe : sentiment de sécurité et de satisfaction accru et plus grande mobilisation.

Alors, est-ce qu’un bon employé fera un bon leader? Dans la mesure où la sélection et l’intégration se font sérieusement, l’entreprise rend plus probable le OUI!

Mario

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©2013, Objectif Coaching

6 réponses

  1. Tout à fait d’accord avec votre analyse.
    Mais je pense qu’une autre bonne question serait son contraire : un bon leader ferait-il un bon employé ?
    J’entends pas là qu’il me semble indispensable que les futurs leaders (en tout cas ceux que leur origine prédispose naturellement à devenir des leaders, notamment en fonction de leur niveau d’études) commencent leur carrière à des fonctions d’exécution, même pour un temps limité, afin de savoir concrètement « mettre les mains dans le cambouis ». Cela pourra plus tard leur éviter des attitudes perçues comme méprisantes, pas ignorance de la réalité du terrain.

  2. Bonjour Monsieur Bouchet,
    Est-ce qu’un bon leader doit nécessairement être un bon employé? Je suis d’avis que non, puisque son rôle est de canaliser le plein potentiel de son personnel vers l’atteinte des objectifs. J’ai personnellement été responsable d’une équipe dans un domaine très spécialisé. Je n’étais pas là pour faire le travail, mais pour coordonner les activités et offrir à mes experts le soutien nécessaire. En les reconnaissant comme les experts et en les impliquant réellement, nous avons réalisé ensemble des changements importants dans un climat de confiance et de respect. Ce qui n’avait pas été le cas avec le leader précédant qui était lui aussi un expert. Il leur disait toujours  » c’est pas ça!  » et avait tué toute initiative et l’intérêt à participer à des projets.
    Évidemment, chaque cas est unique. Pour avoir aussi vécu, le passage d’employé à leader, dans un domaine que je maitrisais bien, cela amène également une dimension intéressante au leader.
    Cordialement
    Mario

  3. une entreprise performante ne positionne pas n’importe qui en situation de leader car le résultat en sera aléatoire donc risqué et l’entreprise doit minimiser les risques ; elle en prend bien assez quand elle choisit des options de développement stratégique.
    l’entreprise performante a pris le temps d’identifier le capital compétences qu’elle possède ; ainsi elle s’ouvre les portes de la performance, que ce soit pour les résultats financiers, technologiques et humains ; les leaders ne sont donc plus choisis par hasard au gré de l’ancienneté ou de l’aisance opérationnelle.
    un leader est reconnu d’abord par ses collègues, par ses compétences et sa capacité à transmettre ses propres compétences ; l’entreprise se doit d’être à l’écoute de l’ensemble de ces paramètres (identifier le capital compétences) et bien connaître sa stratégie de développement pour trouver le leader adéquat pour répondre à la situation momentanée (le leader d’aujourd’hui n’est pas celui de demain et sera approprié pour un projet et non pour un autre) ; ce qui signifie que tout employé ou collaborateur peut se trouver en position de leader à tout moment de sa vie professionnelle.

    1. Merci Bourbon,
      Vous décrivez bien la situation idéale dans une entreprise performante et je suis d’accord avec vous. Toutefois, je suis obligé de nuancer votre propos, lorsque vous dites « que tout employé ou collaborateur peut se trouver en position de leader à tout moment de sa vie professionnelle. » En a-t-il vraiment les compétences? C’est ce qui me préoccupe le plus. Je dois répondre que dans beaucoup cas, avec un bon soutien, il est possible d’aider le nouveau leader à améliorer certaines compétences (c’est autre chose lorsque l’on parle de savoir être). Je rencontre malheureusement des cas où il n’y a rien à faire. Dit comme ça, c’est très dur, mais je vois des leaders totalement inconscients de leurs lacunes et d’autres ,après évaluation de leurs compétences, qui sont trop loin de ce qui est attendu pour penser pouvoir en faire des leaders juste « corrects ».

      Encore aujourd’hui, je suis témoin de situations réelles et à la fois tristes qu’on n’a même pas le courage de corriger, et ce, malgré un constat d’échec évident.

  4. Je ne crois pas réellement qu’il y a une corrélation entre la performance d’un employé et ses compétences en management. Certes, il doit y avoir bonne attitude face à l’entreprise et à ses dirigeants.

    Si nous virons la situation à l’inverse, est-ce qu’un CEO ferait un bon employé? Probablement pas!

    1. En effet Jean-Luc, c’est justement le propos de mon article. Malheureusement, je rencontre encore trop souvent des gens qui occupent des postes d’encadrement, sans que l’on ce soit d’abord assurer qu’ils avaient les compétences nécessaires et sans les soutenir.

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